COMMUNIQUE DE PRESSE
La Ligue Suisse des Droits de l’Homme, section de Genève (ci-après LSDH), s’oppose fermement au renvoi de Monsieur Ayop AZIZ. En tant que victime, celui-ci s’est porté partie civile dans le procès visant à établir les responsabilités en cause dans l’incendie du foyer des Tattes. Son droit à participer au procès doit être respecté et des garanties quant au suivi de son traitement médical doivent être apportées.
Ayop AZIZ est un jeune tchadien de 19 ans arrivé en Suisse à l’été 2014. Il vit au foyer des Tattes, à Vernier, où un terrible incendie s’est déclaré dans la nuit du 16 au 17 novembre. Monsieur AZIZ a quant à lui été grièvement blessé après s’être défenestré du 3ème étage pour échapper aux flammes. Une procédure pénale est actuellement en cours pour déterminer les responsabilités dans cette catastrophe. Monsieur Ayop AZIZ a eu le courage de se constituer partie plaignante mais les autorités maintiennent la décision de le renvoyer en Espagne, en dépit de son droit à participer à ce procès. La LSDH regrette le maintien de la position des autorités, ce renvoi compliquant sensiblement l’exercice de ses droits.
Selon le règlement Dublin, c’est l’Espagne, premier pays de l’espace Schengen où il a été enregistré, qui est responsable du traitement de sa demande d’asile. Le Secrétariat d’Etat aux migrations a refusé d’entrer en matière sur sa demande d’asile, et prononcé son renvoi. Or ce même règlement prévoit la possibilité pour chaque Etat de renoncer au renvoi et de traiter lui-même une demande d’asile (art. 3.2 du Règlement Dublin), en partie lorsqu’il s’agit d’une personne vulnérable. Par ailleurs, dans le cas où la personne n’est pas renvoyée dans un délai de six mois, l’Etat qui était chargé du renvoi devient responsable de la demande d’asile.
La LSDH demande donc au Secrétariat d’Etat aux migrations de renoncer à ce renvoi, en application de la clause de souveraineté. Le cas échéant, elle demande au Conseiller d’Etat genevois en charge du Département de la sécurité et de l’économie, Monsieur Pierre MAUDET, de renoncer sans délai à l’exécution du renvoi de Monsieur Ayop AZIZ.
En outre, la LSDH dénonce fermement les conditions dans lesquelles les autorités genevoises ont tenté de renvoyer Monsieur AZIZ. En effet, c’est le jour même où ce
dernier devait être entendu par le Ministère public que les forces de l’ordre l’ont interpellé, à un moment où son avocat, qui participait à l’audience, ne pouvait pas être présent. Il est difficile d’imaginer qu’il ne s’agisse là que d’un malheureux concours de circonstances, ni même d’une maladresse. Cette manœuvre a non seulement rendu la présence de Monsieur AZIZ à l’audience impossible, mais elle a surtout empêché ce dernier de bénéficier du soutien rapide de son avocat lors de son arrestation. Cette manière de procéder est indigne d’un Etat de droit et inacceptable.
Enfin, la LSDH demande que des garanties soient apportées quant aux possibilités de poursuite du traitement médical que Monsieur AZIZ a dû entreprendre après avoir été grièvement blessé dans l’incendie. Il a eu le crâne fracturé dans sa chute, les douleurs physiques sont donc lourdes. Dans ces conditions, un renvoi forcé apparaît comme particulièrement inadmissible. Outre ces douleurs, il est extrêmement important de tenir compte du grave stress post-traumatique dont souffre ce jeune homme.
Une fois encore la LSDH tient à rappeler son désaccord avec la politique migratoire et en particulier avec une application automatique des accords de Dublin, application qui s’avère ici particulièrement outrancière et en contradiction avec les droits fondamentaux.
Le Comité de la LSDH – Genève Contact : Mélissa LLORENS, 079 738 80 14 Marc MOREL, 078 817 69 86
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